vendredi 21 septembre 2012

Regarder du porno pour sauver les pandas

Deux Italiens veulent lancer un site d'échange de vidéos pornos à but humanitaire.


Extrait de la vidéo de présentation de Come4. - Photo DR

Sauver les pandas, les baleines, ou tout ce que voulez, tout le monde dit que c'est une bonne idée, mais personne n’agit vraiment. Regarder du porno, tout le monde le fait, mais personne ne veut en parler. Deux jeunes entrepreneurs italiens font le pari d’allier les deux, l’éthique et les films pour adultes, en créant un nouveau réseau social.

Sur la plateforme de collecte de fonds Ulule, ils ont déjà réuni 2 881 dollars (2 225 euros) et estiment avoir besoin d'un peu plus de 12 000. Une vidéo mise en ligne sur YouTube présente leur projet, nommé Come4. Selon eux, une partie importante de la population mondiale manque d’eau ou de nourriture et, dans le même temps, l’industrie pornographique gagne toujours plus d’argent. Pour résoudre ce problème et mieux redistribuer l’argent du sexe, les deux entrepreneurs qui n’ont peur de rien veulent créer un réseau social où les internautes pourront partager des vidéos pornos tout en mettant en avant des causes qu’ils soutiennent. En résumé, vous mettez en ligne une vidéo d’un plombier tatoué aidant une jeune femme esseulée et en même temps vous signalez que vous êtes contre la guerre dans le Nord-Kivu.

Les deux entrepreneurs l’assurent à Libération, «ce n’est pas une blague. C’est une opération sérieuse, radicale, perturbatrice, culturelle et politique. C’est le premier site porno entièrement non-lucratif visant à financer des projets humanitaires». Si tout se passe bien, Come4 ouvrira mi-2013.

Ricky et Marco sont tous les deux originaires de Sarrono, une petite ville de la banlieue de Milan. «Aucun de nous n’est lié à l’industrie du porno, et c’est qui fait à notre avis notre force», expliquent-ils. Le premier est urbaniste, le second a un doctorat de philosophie. «Il faut que les gens qui ont envie de partager ce type de contenu cessent de considérer les sites commerciaux comme la seule alternative possible.»

Ils espérent que les gens téléchargeront leurs vidéos amateurs (très peu probable) ou que des producteurs spécialisés diffuseront leurs contenus. Ils assurent «qu’au contraire de nombreux sites, nous ne voulons enfreindre aucune loin sur le copyright». Avant chaque visionnage, une publicité sera diffusée, un peu comme sur YouTube – sauf qu'il sera plus compliqué de trouver des annonceurs non liés à l'univers du sexe – et l’argent sera reversé à des organisations impliquées dans la cause que l’utilisateur a choisi. Ce n'est pas la première fois d'ailleurs que des militants tentent d'allier éthique et porno : en 2004, un couple de Norvégiens a lancé le site Fuck for forest, du porno pour récolter des fonds contre la déforestation.

Les utilisateurs suivront-ils ?

Les deux entrepreneurs italiens disent, eux, ne pas vouloir s’arrêter aux pandas et n’hésitent pas à espérer «changer le monde». «Nous sommes conscients que la pornographie est un sujet sensible», expliquent-ils. Ils savent déjà que certaines associations ne voudront pas de leur argent. C’est certain qu’on imagine mal Familles de France accepter. Selon eux, les premiers fonds récoltés iront à l’Asta Philpot Foundation, une organisation qui réclame le droit à l’accès au sexe pour les personnes handicapées. Son président, Asta Philpot, né avec une maladie congénitale, l’arthrogrypose, a inspiré la comédie belge Hasta la Vista, sortie en 2011. Il a confirmé à Libération que des contacts ont été effectivement pris.

Afin de lancer leur projet, ils estiment qu’ils ont seulement besoin de 12 000 dollars, ce qui paraît bien dérisoire pour un réseau social demandant une importante bande passante. «Nous pensons que c’est suffisant pour contruire un prototype de notre site qui fonctionne. Mais, bien sûr, Come4 aura besoin de plus de financements pour se développer au maximum», précisent-ils. Pour le site français spécialisé Le Tag Parfait, «tout le monde rêve de monter un YouPorn-like altruiste, ouvert et innovant – nous les premiers». Mais «c’est un sale business, réservé à quelques filous sans scrupules et à des webmasters qui se moquent sensiblement de la qualité du contenu (allez jetez un œil sur les tubes alternatifs, français par exemple…)» Lors du lancement de MypornMotion en 2007, ses fondateurs avaient ainsi annoncé vouloir créer un réseau social participatif dans l'Hexagone où les utilisateurs posteraient leurs propres vidéos et où l’on discuterait, de manière ouverte, de questions sexuelles. Cela n’a jamais fonctionné.

Car, pour Come4, encore faudra-t-il que les internautes aient envie de participer. Si la consommation de porno est très développée, elle se vit souvent de manière cachée voire coupable. Même si c’est pour sauver les pandas, assumer que l’on a aimé une vidéo pour adultes ne sera pas évident pour tout le monde.

Source : http://next.liberation.fr/sexe/2012/09/20/regarder-du-porno-pour-sauver-les-pandas_847615